La Clusaz – Eglise Sainte-Foy

Dans la famille des grandes stations de ski savoyardes, je demande « La Clusaz ». Bonne pioche : je vous propose aujourd’hui de découvrir un clocher emblématique de notre région qui -à travers les époques- à servi tantôt de repère aux paysans avant de l’être pour les skieurs, amateurs des belles pentes du massif des Aravis. Comme son nom l’indique, le village se situe en amont d’une « cluse », c’est-à-dire un resserrement de la vallée creusé par le torrent du « Nom » prenant sa source au célèbre Col des Aravis, limite entre la commune avec celle de la Giettaz, en Savoie. Mais La Clusaz est également une commune à l’histoire singulière. Essentiellement agricole, elle s’organisait alors autour de son église. Celui qui trouvera des vielles cartes postale n’en croira pas ses yeux : hormis le haut clocher à bulbe, la transformation est flagrante ! C’est en 1902, grâce à l’ouverture d’une route touristique qui emprunte le col des Aravis que La Clusaz commence à développer les sports d’hiver et d’été. 5 ans plus tard, le premier concours de ski est organisé. Il sera le prélude à un fort développement aidé par des passages ponctuels du Tour de France, le développement d’importantes infrastructures sportives et une multiplication des lits touristiques : on en recense pas moins de 20’000 aujourd’hui !

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La paroisse de la Clusaz a vu le jour en des temps anciens, en témoigne son patronage : l’église est vouée à sainte Foy d’Agen, jeune martyr des premiers siècles chrétiens. Les archives laissent entendre que cette fondation est intervenue alors que le diocèse de Genève développait le culte à la sainte, aux alentours du Xe siècle. Une église est en tout cas attestée en 1285 et le 21 octobre 1470, Mgr Fichet consacre un nouveau maître-autel pour le sanctuaire. Divers noms ont alors attribués à la localité, l’avant dernier étant « La Cluse-Lieu-Dieu » accordé par les abbés de Talloires dont dépendait la paroisse jusqu’en 1772. Le clocher a connu cette période puisqu’il a été construit entre 1751 et 1762, du moins ses murs. Comme pour presque tous les autres clochers de la région, il a été décapité à la Révolution et le bulbe actuel a été reconstruit qu’en 1872. L’église, quant à elle, sera partiellement reconstruite et agrandie sur les plans du savoyard Camille Ruphy en 1821. De cette église consacrée le 29 mai 1829, il ne reste hélas rien. A la fin des années 1960, le monument représente un danger pour les fidèles qui s’y rendent. La fréquentation saisonnière importante ajoute à cet inconfort car l’édifice était également jugée trop petit lors des grandes célébrations. En 1971, une circulaire est envoyée à toutes les familles de la commune afin de statuer sur l’avenir du monument religieux : faut il le rebâtir ou le restaurer ? Deux devis sont alors établis : 900’000 francs pour le restaurer, tandis qu’une église neuve de 800 places coûtera 1’500’000 francs. Après moults discussions et recherche de fonds, elle est finalement détruite pour laisser place à un plus grand sanctuaire paroissial en conservant le clocher. Mgr Bernard Panafieu, évêque auxiliaire d’Annecy et futur cardinal en a béni la première pierre le 24 novembre 1974. Le 13 juillet 1975, Mgr Jean Sauvage, évêque d’Annecy, consacrera la nouvelle église toujours sous le vocable de sainte Foy. On notera quelques modifications majeures en plus du style contemporain : l’église est tournée de 180° pour que son entrée soit face à la grenette. La tour, jadis près du chœur, se retrouve plus valorisée en dominant la grande place au centre du village.

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Si la maçonnerie du clocher actuel date du milieu du XVIIIème siècle, c’est parce que la paroisse était motivée par ces travaux… et aidés par des exilés ! Lors de cette reconstruction, les natifs du village installés à Paris font une quête non seulement pour la tour mais surtout pour installer une grosse cloche ! En 1767, il est demandé à Jean-Claude Livremont, établi à Annecy, de fondre une cloche de vingt quintaux. La même année, ce fondeur réalisera également deux cloches pour la paroisse non lointaine du Grand-Bornand, autre sonnerie majeure des Aravis. Mais au bout de quelques décennies, le clocher voit arriver sa première épreuve : la Révolution. Son bulbe sera détruit afin d’être réduit à quatre murs et les cloches seront déposées puis emmenées à Annecy vers 1793/1794. En 1796 déjà, la ferveur est de retour à La Clusaz. Les 17 et 25 août 1797, deux nouvelles cloches sont fondues à La Clusaz : elles pesaient 23 et 4 quintaux. Le 23 octobre 1797, une horloge sonne à nouveau au clocher grâce aux cloches nouvellement installées et au don de Gabrielle Donze-Gargand.
Grâce aux dons de Pierre Avetan-Nicoud et à d’autres donateurs anonymes, on fond en 1852 à Quintal « Marie-Jacqueline », d’un poids de 800 kilos. Quatre années plus tard, c’est la grosse cloche qui prend à son tour le chemin du four des frères Paccard pour être augmentée. La commune financera cette opération avec une coupe de bois extraordinaire et une souscription volontaire. Elle revient bien plus imposante car elle a encore le titre de seconde plus grosse cloche des Aravis, après le bourdon du Grand-Bornand qui l’a devance d’environ 500 kilos.
En 1947, la commune fait électrifier les trois cloches alors estimées par le campaniste à 2’400, 800 et 300 kilos. Cinq années plus tard, la fonderie Paccard refond et augmente la petite cloche. S’agit-il de celle de 4 quintaux fondue en 1797 avec la grosse cloche ? La question reste en suspens. Une chose est sûre : on profite de cette refonte pour offrir au clocher une sonnerie beaucoup plus harmonieuse : la cloche moyenne accompagne sa petite sœur pour être réaccordée sans être refondue. Si elle perd quelques kilos suite à  son accordage (on meule son intérieur pour abaisser sa note) sa petite sœur aura résolument pris un petit peu plus de poids : près de 150 kilos ! Elle permet donc au clocher d’égrener un bel accord dit « Alléluia » avec le « la du diapason », le « fa » qui répondent au puissant « do » de la grosse cloche, grâce à son profil dit « renforcé » : c’est-à-dire que le rapport note/poids est plus important que celui de ses petites sœurs. 

Nom

Fondeur

Année

Diamètre (cm)

Masse (kg)

Note

1

Foy Rosalie

Paccard frères

1856

156

2’300

Do 3

2

Marie Jacqueline

Paccard frères

1852

110,5

800

Fa 3

3

Jeanne Marie Gabrielle Yvonne

Fonderie Paccard

1953

89,9

460

La 3

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J’adresse mes chaleureux remerciements à :

  • La municipalité de La Clusaz et son maire M. Didier Thévenet, pour l’aimable autorisation.
  • Le centre technique municipal et son responsable, M. François Raget.
  • Le service bâtiments dont M. Stéphanic Eldin, pour l’accompagnement.
  • La paroisse Saint-Pierre-Favre en Aravis et les sacristains pour les sonneries spéciales.

Sources & liens :

Mairie de la Clusaz
40 ans de l’église de La Clusaz
Mémoires et documents de l’Académie Salésienne, Tomes 60 et 61 – Années 1942 et 1943
Fonds privés
Inventaire personnels
Anciennes cartes postales

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