Hauteluce – Eglise Saint Jacques d’Assyrie

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C’est au cœur du Massif du Beaufortain qu’est installé le village d’Hauteluce avec ses 800 âmes. Dressé sur le versant nord d’une combe creusée par les caprices du ruisseau du Dorinet, il semble vaincre le temps. Naturellement, ce secteur jouit d’un patrimoine considérable. Sur le plan environnemental, la commune offre une très belle vue sur le Mont-Blanc et son massif, mais aussi sur les montagnes alentours. Le barrage de la Girotte est également réputé comme ses confrères de Roselend ou de la Gittaz, sis non loin. Ses deux églises et ses multiples chapelles forment les fondations du patrimoine architectural. Il est bon de noter la présence d’un écomusée. Naturellement, sur le plan touristique, la commune profite de sa proximité avec plusieurs stations de ski renommées. Le col des Saisies possède sa propre station de ski qui communique avec celle de Praz-sur-Arly, près de Megève. Au fond de la vallée, la station du hameau de Belleville est reliée à celle des Contamines-Montjeoie, elle aussi installée en Haute-Savoie. Lors des grandes affluences, l’endroit est capable d’accueillir près de 16’000 personnes. Aujourd’hui, la commune est organisée en deux bourgs en sus de multiples hameaux : Hauteluce et les Saisies. Si ce dernier a été crée au XXe siècle avec le développement des sports d’hiver, il ne peut rivaliser avec le chef-lieu de la commune qu’est Hauteluce, fièrement organisé depuis des siècles à l’ombre de son clocher.

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Dédiée à Saint Jacques d’Assyrie, premier évêque de Tarentaise, l’église paroissiale est classée monument historique. Cette église halle est conforme aux édifices du Beaufortain : la tribune ne se contente pas d’être au fond de la nef : elle remplit également une grande surface des bas côtés, représentant ainsi un « U » dans le sanctuaire. Notable exemple de l’art baroque en Savoie, le gros-œuvre semble avoir été achevé en 1558. Il y a donc fort à parier que l’église actuelle ait été le fruit d’un grand remaniement au XVIIIe siècle, après le ministère de Saint François de Sales qui introduit en Pays de Savoie le style baroque architecture de la « contre-réforme ». Il serait un tantinet long de citer un à un les remarquables éléments de cet édifice. Il est toutefois utile de préciser que la façade, les retables, la chaire, la tribune… enfin l’édifice dans son intégralité, méritent le détour et une grande attention! Un élément peut perturber le visiteur s’il est tête en l’air… l’ancienne horloge du clocher est décorée d’un squelette représentant « la mort » !

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Le clocher -parlons en- a été reconstruit entre 1820 et 1825 ! Lors de cette reconstruction, on installa une première cloche, toujours en place. Elle a été fondue par les fondeurs Vallier & Gautier en 1824, un temps établis à Albertville. Louis Gautier a fondu la même année une des cloches de Queige. Il est difficile de dire si elle en remplace d’autres et si elle tenait compagnie à d’autres vases sonores. Cette cloche est aujourd’hui accompagnée par quatre Paccard livrées par trois générations différentes. La troisième cloche, nommée « Honorine », a été fondue en 1973. Elle est affectueusement surnommée « cloche du midi ». La quatrième porte la date de 1884 et les noms de Georges & Francisque Paccard, illustres représentants de la troisième génération des maîtres-fondeurs. La génération précédente a eu le soin de réaliser deux cloches : Claude Paccard a réalisé en 1851 la plus petite, encore actionnée à la corde, alors que Claude & Jean-Pierre Paccard ont coulé le « bourdon » nommé « Marie-Hélène » à une date inconnue, car non mentionnée. Ses différents motifs et son lieu de fonte nous permettent d’affirmer qu’elle a été fondue entre 1830 et 1857. Il se peut que les archives soient plus bavardes sur son sujet, et j’espère que ce mystère sera résolu un jour! Si cette grosse cloche égrène chaque heure qui passe et ce depuis l’installation d’une horloge mécanique puis électrique en 1914, elle était lancée en volée avec ses sœurs selon un code précis : l’angélus était sonné par la troisième cloche dite « du midi ». Elle sonnait en volée 60 coups. Suivaient les traditionnels 3*3 coups de l’angélus. Cet angélus dit « inversé » était jadis particulièrement prisé par les paroisses de montagne. Les habitants du lieu étaient conviés à l’office divin par une volée de la grosse cloche. Ses 22 quintaux nécessitaient pas moins de trois sonneurs, souvent usés à la fin de la volée. Avant l’électrification en 1949, tout un code prenait place pour annoncer les décès : le curé faisait d’abord quelques coups pour convoquer une dizaine de sonneurs au clocher (au moins huit). Si la personne décédée était mariée, la seconde cloche ouvrait le bal. La troisième cloche était lancée en premier pour un homme célibataire, et la quatrième pour une femme célibataire. Enfin, la plus petite avait préséance pour les plus jeunes. Les cloches étaient lancées pour trois « moeudes » (3* 10 minutes) et si la personne vivait dans un hameau, elles n’en sonnait que deux, car la chapelle aussi sonnait deux « moeudes ». Les membres des confréries avaient eux aussi droit à des sonneries particulières, mais plus aucune archive ne nous les décrit. Lors des fêtes religieuses, des mariages et des baptêmes, le carillon jouait un mélodie joyeuse. Il pouvait aussi résonner lors des sépultures d’enfants en bas âge car ceux ci étaient considérés comme des anges qui montaient directement au ciel. Le soir de Toussaint, les cloches sonnaient un autre glas : elles tintaient l’une après l’autre, jusqu’à minuit. Encore aujourd’hui, elles font partie intégrante du paysage sonore de la commune.


Le plénum : volée des cinq cloches.

Nom Fondeur(s) Année Masse (kg) Diamètre (cm) Note
1 Marie Hélène Frères Paccard Entre 1830 1857 2’200 153,8 Do 3
2 Jacoba Vallier & Gautier 1824 925 117 Mi 3
3 Honorine Paccard 1973 620 100 Sol 3
4 Sophia Emilia G&F Paccard 1884 250 74,4 Do 4
5 Ste Vierge Claude Paccard 1851 100 53,3 Fa 4
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La cloche numéro quatre, arrimée derrière une des baies est du clocher.
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La grande cloche, seule.

Mes remerciements pour cette visite à Madame Mireille Gioria, maire d’Hauteluce pour ses autorisations et son accueil. Je remercie également l’agent technique qui a pris de son temps en pleine saison pour nous accompagner dans ce beau clocher. Remerciés soient également l’actuel « sonneur » qui nous a permis de lancer ces quelques volées de la sacristie et M. Edouard Meunier, maire de Queige, pour l’organisation de cette visite attendue depuis des années. Enfin, je ne peux oublier mon ami Matthias Walter, expert-campanologue à Berne et président de la GCCS pour l’aide et les moments de convivialité!

Sources :
Mairie d’Hauteluce
Fonds privés
Relevé personnel

Voir aussi :
Office du Tourisme
Paroisse Saint Roch en Beaufortain
Hauteluce sur Wikipédia
Eglise d’Hauteluce sur Wikipédia

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