Neydens – Eglise Saint-Laurent

Entre le Salève et le bassin genevois, la commune de Neydens a su garder l’aspect d’un bourg paisible, loin de l’agitation citadine de certaines communes alentours. Il faut pourtant signaler que ce qui ne fut jadis qu’une petite paroisse parmi tant d’autres est habitée par 2’500 âmes, soit cinq fois plus qu’avant les années 1960. Le site internet de la commune de Neydens compare son village à une « mosaïque », et à juste titre ! Il suffit de prendre de la hauteur pour comprendre la raison de ce mot : des coins de verdure, quelques hameaux, un bourg principal et une zone d’activités avec en tête le centre Vitam et pour les plus nostalgiques le Macumba, aujourd’hui présent dans les souvenirs de nombreux haut savoyards. Si nous plongeons dans le passé, nous comprenons que Neydens est né il y a 2’000 ans, sinon bien plus tôt, de par sa position à l’ombre du Salève. La Via Romana, reliant Annecy à Genève par le Mont Sion traversait le bourg de la commune.

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La paroisse de Neydens est placée sous le vocable de saint Laurent, diacre du pape Sixte II au IIIème siècle et mort en martyr brûlé vif sur un gril. Il figure d’ailleurs en bonne place sur l’un des vitraux du chœur de l’église. Si le lieu de culte actuel date de la fin du XIXème siècle, d’autres monuments l’ont précédés, et pas forcément de la même confession. Tout d’abord, mentionnons que les chartreux de Pomier, installés près de Neydens dès le XIème siècle desservaient une chapelle à l’emplacement d’un temple romain bâti lui-même sur les fondations d’un lieu de culte païen. Ils contribueront certainement à l’édification d’une église romane dès leur installation, église malheureusement détruite en 1891. Sous le joug des évêques de Genève, la paroisse de Neydens tomba sous la domination protestante en 1536, lorsque la religion protestante devient la religion officielle de la ville de Genève et que l’évêque est chassé de sa cathédrale. L’église romane deviendra donc un temple placé sous la responsabilité d’un pasteur. Cette situation durera jusqu’en 1754 et la signature du traité de Turin qui a permis de définir une vraie frontière entre le royaume de Savoie et Genève. La Révolution n’aura pas épargnée la valeureuse église Saint-Laurent (redevenue catholique et reprenant son vocable primitif). Cet édifice servira encore un siècle, avant de menacer ruine en 1889. Il faut dire qu’après huit siècles, dont certains tourmentés, l’édifice avait vécu. Peut-être qu’aujourd’hui, on aurait préféré le restaurer, mais à l’époque, il a été choisi de le démolir et d’en construire un nouveau. Les plans sont confiés à l’architecte Fontaine d’Annecy et la construction coûtera 30’000 francs. Le bulbe du clocheton, installé sur le chœur, est donc remplacé par une flèche couronnant une tour dressée dans l’angle entre le chœur et une des chapelles latérales de l’édifice. Il fallait que la flèche se voie de Genève, qui contrôlait jadis la paroisse. L’évêque d’Annecy consacrera le monument le 9 octobre 1892 entouré de nombreux prêtres au cours d’une cérémonie emprunte de solennité. Dans cet édifice néogothique, la décoration fut épurée au milieu du XXème siècle. Le concile Vatican II tenu à Rome en 1963-1965 demanda -entre autres- une plus grande simplicité dans la décoration des églises et que le prêtre soit dorénavant face au fidèle. Les retables, stalles et de nombreuses statues furent alors remisés, sinon détruits. Dorment encore dans le clocher certains protecteurs du passé qui pourraient -on l’espère- ressurgir un jour où l’autre dans cette charmante petite église.

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Le 12 mai 1805, le recteur d’Archamps se rend à Neydens. Son rôle ? Présider la bénédiction d’une cloche fondue l’année précédente par Jean-Baptiste Pitton, maître fondeur de Carouge. Cette petite cloche de 280 kilos n’arborait que les noms de ses parrains et marraines, en plus de la signature et du nom de la paroisse, orthographié « Neidens ». En 1888, cette cloche était encore bien seule dans son petit clocheton, elle qui s’apprêtait à rejoindre un nouveau perchoir en 1892. Mais en 1899 déjà, elle était fêlée. Le curé de la paroisse passe alors commande aux frères Paccard d’Annecy-le-Vieux de deux cloches. Pour que la paroisse puisse correctement attendre ces deux nouvelles dames d’airain, la fonderie propose de remplacer la cloche Pitton par une autre cloche qui sera prochainement cassée. D’un poids de 475 kilos, elle provenait de l’église Saint-Maurice de Pringy qui avait fait remplacer sa sonnerie en 1897.  Les archives paroissiales nous indiquent que la grosse cloche a été financée par ses parrains et marraines et la petite par une souscription paroissiale. Les inscriptions font d’ailleurs mention des principaux donateurs de cette quête. Fièrement nommées « Félicie Marie Antoinette Françoise » pour la plus grosse et « Joséphine Etiennette Laurence » pour la seconde, elles arborent des effigies en lien avec leurs noms : le Christ, l’Immaculée Conception, saints Antoine et Félix pour la première et les saints Laurent, Joseph, François de Sales et le Sacré Cœur de Jésus pour la petite cloche. Le privilégié qui pourra gravir ce clocher aura plaisir à découvrir deux cloches finement décorées dans un univers tout de bois. Le beffroi qui soutient ces deux cloches intrigue d’ailleurs : il n’a pas été conçu sur un seul niveau comme les Paccard réalisaient à l’époque leur beffroi pour une telle sonnerie, mais il est sur deux niveaux ! Le deuxième niveau accueille aujourd’hui le plancher séparant la chambre des cloches de la flèche. Mais au-dessus de la petite cloche, des traces de cambouis interpellent : elles se trouvent autour d’encoches qui ont très certainement accueillis les paliers d’une cloche. Est ce que le beffroi a été conçu en 1899 et la cloche de Pringy y avait trouvé refuge, afin de laisser les emplacements pour installer facilement les deux cloches de 1900 ? Nul ne sait.

Nom

Diamètre (cm)

Masse (kg)

Note

1

Félicie Marie Antoinette Françoise

119,2

1’030

Mi 3

2

Joséphine Etiennette Laurence

94,9

535

Sol 3

Georges & Francisque Paccard fondeurs à Annecy-le-Vieux Hte Savoie 1900

 

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Mes remerciements vont à : 
Madame Marie-Françoise Vandenbosch pour l’accès au clocher, les sonneries spéciales et les fournitures d’archives.
Monsieur Michel Brand pour l’organisation du rendez-vous.

Sources & Liens :
Mairie de Neydens
Paroisse Saints-Pierre-et-Paul en Genevois
Clichés personnels
Fonds privés
Archives paroissiales

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