Chênex – Eglise Notre-Dame-de-l’Assomption

Au cœur du Genevois, à quelques encablures du bec que forme la Suisse en France, la commune de Chênex se dresse contre les pentes douces de la montagne de Sion, à proximité du Mont Vuache. Cette petite commune rurale a été longtemps marquée par l’agriculture. Elle donnera cependant de nombreux ecclésiastiques au diocèse d’Annecy. Deux d’entre eux seront élevés à la dignité épiscopale : d’une part Mgr Joseph Duval, archevêque de Rouen et Primat de Normandie et d’autre part son oncle, le cardinal Léon-Etienne Duval, archevêque d’Alger. Ces deux personnalités religieuses du XXème siècle ont été baptisées dans le baptistère, au fond de l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Chênex.

On retrouve des traces de la paroisse depuis le XIIIème siècle. Mais il est probable qu’elle soit plus ancienne. La visite de l’évêque en 1412 est assez détonante : le curé vit en concubinage et les paroissiens dansent dans l’église ! De quoi agacer le prélat. A la Réforme, la paroisse n’échappe pas aux protestants qui y imposent par la force leur religion dès 1536 (nous ne sommes qu’à quelques pas de Genève !). En 1598, onze paroissiens abjureront le protestantisme aux Quarante Heures de Thonon. Au XVIIème siècle, la paroisse est un temps sous le joug de celle de Viry. Car si l’église était relativement préservé de l’invasion protestante, il n’y avait plus de presbytère et plus de prêtre non plus dans la paroisse ! A la Révolution, comme toutes les communes, Chênex est privé de cloche et clocher. La paroisse sera une nouvelle fois rétrogradée au Concordat pour être rattachée cette fois à Valleiry. Si Chênex a pu redevenir une paroisse indépendante, c’est grâce au curé de Valleiry en personne… malgré lui ! Il fallait reconstruire son église et il mit à profit toute sa paroisse. Cependant Chênex ne l’entendait pas de cet avis : il y avait une église elle aussi en mauvais état. Après d’âpres discussions et coups bas, Chênex redevient indépendant en 1841. Mais il fallut encore 50 ans avant de pouvoir entreprendre des travaux sur l’église, manque de moyens. En 1888, le vicaire général d’Annecy déclare à propos de l’église qu’il n’y en a pas davantage délabrée dans le diocèse ! Après avoir trouvé les fonds, l’église est bâtie dès le 20 mai 1890 à un autre emplacement (plus loin de la rivière) et l’évêque consacrera le lieu le 24 septembre 1892. On a confié les plans du monument à l’architecte Dénarié qui a proposé un style néo roman. L’église possède encore le tabernacle de la chartreuse de Pomier, probablement du XVIème siècle et une Vierge à l’Enfant du XVIIème. L’orgue à tuyaux est un don du cardinal Duval en personne. Initialement installé à l’église Notre-Dame-des-Victoires d’Alger, ce monument redeviendra une mosquée lors de l’indépendance algérienne et l’orgue y était donc superflu. 

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Le clocher, qui vient de troquer son ancienne flèche délabrée contre une neuve, abrite deux cloches. Elles ont été installées de l’ancienne église dont elles sont des vestiges. Avant cela, le registre des baptêmes nous indique que le 2 octobre 1760 est bénie une cloche dédiée à la Vierge Marie et conçue par Jean-François Livremont. Son poids était d’environ 196 kilos. Démontée à la Révolution et déplacée à Carouge pour y être fondue, elle est remplacée en 1796 par une cloche issue du dépôt de Bonneville. Il est évident que cette cloche n’a jamais connu Chênex avant son installation ! Au début des années 1860, la cloche est provisoirement placée sur des poutres de bois en mauvais état et à chaque sonnerie, tout menace ruine ! Les délibérations municipales nous apprennent plus tard qu’en 1866, la cloche unique est cassée et qu’il faut la refondre. Il convient alors de la remplacer par une cloche toute neuve. Le 30 avril 1867, le fondeur Burdin Ainé de Lyon ne livre pas une mais deux cloches fondues l’année précédente ! La grosse cloche arbore le nom de ses parrains et marraines, du maire, de son adjoint et du curé. La plus petite cloche cite également son parrain et sa marraine en précisant que c’est un hommage à Marie Immaculée de leur part. Il y a donc fort à parier que cette cloche est un don spécial. En 1873, le conseil municipal expose qu’il reste à régler une somme importante à M. Burdin. La faute serait aux souscripteurs qui y mettent « de la mauvaise volonté ». Une autorisation est demandée au préfet de prélever la somme sur son budget pour préserver l’honneur de la commune. En 1989, les deux cloches doivent être électrifiées. Problème : la plus grosse semble sonner comme une cloche fêlée. Décision est prise de la remplacer. Une cloche neuve est donc fondue aux ateliers Paccard moyennant un rabais avec la reprise de la vielle cloche. Mais Pierre Duval -habitant du village- ne pouvait se résoudre à voir cette cloche partir à la casse et la rachète au prix du bronze. Elle coule depuis une retraite paisible dans sa propriété, à quelques pas du clocher. Comme cette cloche devait disparaître, la décision avait été prise de reprendre ses inscriptions sur la nouvelle, tout en y ajoutant la seconde date de fonte et le nom des autorités en place (maire, adjoint et curé). 

Nom

Fondeur

Année

Diamètre (cm)

Masse (kg)

Note

1

 

Fonderie Paccard

1989

83,8

~360

Si3

2

Marie Immaculée

Burdin Ainé

1866

58,3

~145

Fa 4

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Mes remerciements à : 
M. Pierre-Jean Crastes, maire de Chênex
M. Luc Brunier, cantonier de Chênex
Mme Dominique Miffon, auteure d’une prochaine biographie sur le village de Chênex
M. Claude Mégevand, président de la Salévienne

Sources & Liens :
Mairie de Chênex
Archives Départementales de la Haute-Savoie
Fonds de Mme Dominique Miffon
La Salévienne
Fonds privés
Clichés personnels
Relevé sur site

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